Janvier 2018
Michel FARIN, Le massacre de l'innocent, Editions Vie Chrétienne, Paris, 2017.
Michel Farin est jésuite. Réalisateur, il a animé de nombreuses années l'émission le jour du Seigneur. Ses réflexions en matière de média sont judicieuses. A travers le triste spectacle des enfants qui sont tués, comme si le massacre des innocents rapporté par saint Matthieu se prolongeait, il élabore une réflexion qui dit à l'oeuvre un ennemi de l'humanité. Les textes bibliques permettent de viser les mécanismes à l'oeuvre pour ce genre de massacre ou de persécutions qui se présentent lorsque l'esprit de puissance prend le pas en l'homme sur l'Esprit créateur que le Seigneur lui propose. L'enjeu est de taille : la paix, le refus de la violence dépendent d'un éclairage sur les mécanismes de la violence. Il s'agit de repérer les conditions qui font pencher l'homme vers la recherche de puissance pour trouver un signal d'alerte et le réveiller à ses devoirs comme celui du respect envers le petit, envers la fragilité d'une vie. Le thème est important, et par l'allusion à la violence de notre monde, éminemment actuel.
Bruno REGENT, De la vie spirituelle. Repères, Fidélité, Namur, 2017.
Un livre pour grandir en vie spirituelle grâce à quelques principes ou plutôt quelques clés, quelques repères, pour avoir de quoi éclairer ce que veut dire vivre les relations à soi, aux autres et à Dieu. La vie est ainsi relue à travers une trentaine de thèmes qui cernent l'essentiel. Chaque thème se termine par l'une ou l'autre question ou invitation à une mise en exercice ainsi que par quelques références bibliques. Un guide précieux pour donner des bases de discernement, pour nourrir la parole sur la vie intérieure.
Gaston PIETRI, Vous avez dit « pastorale » ? Dire Dieu aux femmes et aux hommes de ce temps, Mediaspaul, Paris, 2017.
Gaston Pietri, prêtre qui a été secrétaire adjoint à la conférence épiscopale de France, entend éclairer la pastorale pour les hommes et les femmes de ce temps. La réflexion sur l'intelligence de la foi évoque les « lieux » théologiques que sont l'Écriture et la Tradition de l'Église mais l'auteur ajoute l'actualité : il faut saisir les tournants de l'histoire, repérer en écoutant à la fois la parole de Dieu et la parole des hommes, que la question de la foi n'est plus seulement une manière de pouvoir répondre, comme dans un catéchisme, à des questions fabriquées à la mesure des réponses. Car il s'agit d'accompagner des sujets avec leurs motivations propres, avec ce qui les traverse et les structure dans une adhésion personnelle qui n'est plus du tout une conformité à une prise de la chrétienté sur une réalité sociale. Le livre abonde en formules claires et perspicaces pour cerner les voies que la pastorale peut emprunter. Il fait allusion à bien des références bibliques et cherche aussi à expliciter ce que sera une Église lieu de rencontre, une Église qui, pour son existence propre, mise sur un « autrement » des rapports humains selon la Bonne Nouvelle du Christ.
Joseph RATZINGER, Peuple et Maison de Dieu dans l'ecclésiologie de saint Augustin, Artège – Lethielleux, (Sed contra), traduction de l'allemand par Eric Iborra, Paris, 2017.
Cet ouvrage est la thèse de Joseph Ratzinger soutenue en 1951 à la faculté de théologie de l'Université de Munich. Elle fut publiée en allemand pour la première fois en 1954. Le théologien Gottlieb Söhngen qui dirigeait la thèse pensait que son élève mettrait davantage en évidence la notion de peuple de Dieu. Mais Ratzinger fit valoir que la perspective était plus vaste et que la réflexion sur l'Église devait s'articuler avec des dimensions christologique, eucharistique et pneumatologique. Une force de cet ouvrage tient à la capacité de son auteur d'équilibrer historicisation et actualisation : il parvient d'une part à exprimer les idées clairement en lien avec leur contexte historique. D'autre part, il met en évidence ce qu'un auteur ancien tel que saint Augustin peut avoir de stimulant pour la pensée aujourd'hui. Le travail met en évidence, avec la notion de peuple, le risque d'une lecture sociologique portée par un traitement médiatique surtout dans le bainde la remise en cause de la hiérarchie. Dans sa lecture attentive des pères, Ratzinger repère que l'Église apparaît chez Augustin, parce que l'unité de l'Église vient de l'amour qui est Dieu, comme un lieu où l'homme vit de la vie de Dieu qu'est l'amour, la caritas. Le futur pape doit aussi éclairer les interprétations possibles de la Civitas Dei. La présence de Dieu-amour est fondement de l'unité des hommes en lui. L'exercice intellectuel qu'est cet ouvrage est remarquable de clarté et de rigueur et il invite à une découverte passionnante des articulations de la pensée d'Augustin dans ce qu'elle peut avoir de fécond pour comprendre l'Église.
Colette KESSLER, Dieu caché, Dieu révélé. Essais sur le judaïsme, préface du rabbin Daniel Farhi, postfaces de Marguerite Léna et de soeur Marie-Louise Niesz, Parole et Silence, Paris, 2017.
La notion de révélation présente des différences suivant qu'on se situe dans la tradition juive et dans le christianisme. Mais ce livre, qui reprend des écrits de Colette Kessler, donne la conviction que le jeu entre caché et révélé qui sous-tend l'ouverture à la présence divine dans le judaïsme peut être fécond pour revoir ensuite la vie chrétienne selon ce qu'elle donne à voir de Dieu et ce qu'elle accueille comme manifesté du Dieu invisible. On trouve dans ce livre paru chez Parole et Silence nombre d'enseignements destinés à un public chrétien, notamment dans un essai intitulé Dieu caché, Dieu révélé dans le judaïsme reprenant un enseignement que Colette Kessler a donné aux Soeurs de l'Epiphanie de Peyremale. On trouve aussi un magnifique témoignage d'une présence à Dieu dans les fêtes juives qui le célèbrent et réactualisent son action ainsi que dans une vie qui se rend attentive à Lui en scrutant la loi, les prophètes et les psaumes. Qu'il y ait révélation ne veut pas dire qu'il ne faut pas encore et toujours chercher Dieu. Est ainsi lancée une invitation à étudier les textes, à y trouver de quoi renouveler l'attention à Celui qui s'y dit.
Valérie LE CHEVALIER, Ces fidèles qui ne pratiquent pas assez. Quelle place dans l'Église ? Lessius, (La Part-Dieu), préface de Christoph Theobald, Namur, 2017.
La réflexion menée dans ce livre pose une question importante dans le contexte d'une moindre fréquentation des églises. Se situant parmi les « pratiquants », le point de vue réfléchit à ce qu'est la place dans l'Église des pratiquants occasionnels. Comment faire communauté quand l'attachement à la communauté et le ralliement à celle-ci ne semble pas de la même intensité ou quand le sens théologique de la communauté ne semble pas être manifesté dans le choix de la rejoindre ?
Une telle réflexion s'imposait.
Xavier DIJON, Le transhumanisme, Fidélité, (Que penser de, 92), Namur, 2017.
Le transhumanisme est une nébuleuse où se retrouvent différentes tendances pas toujours d'accord entre elles. Certaines visent un progrès individuel, d'autres pensent davantage une amélioration pour l'ensemble de l'humanité. Il s'agit d'avoir recours à la technologie pour permettre à l'être humain de faire reculer ses propres limites en modifiant son génome ou en couplant son cerveau avec l'ordinateur, en transformant ses cellules par des matériaux plus solides, ou d'autres démarches encore. Le rapport à la nature, dans le cas d'une prise en main de l'homme par lui-même, est profondément changé puisqu'on refuse certaines limites qu'il représente et qu'on ose certains dépassements. Au niveau théologique, on remarque alors que la liberté accordée par le Créateur à la créature revient pour celle-ci à prendre au moins en partie un rôle de créateur. Il s'agit d'une sorte de religion sans Dieu où la création n'est plus présidée par un Créateur et où le salut, ou ce qui en reste, ou ce qui masque un réel salut, ne dépend plus de l'attente d'un Sauveur autre que la technique développée par l'homme. On y évoque peu ce qu'est l'esprit et le don que représente chaque personne est complètement ignoré. La condition humaine comprend la fragilité mais aussi une dignité qui ne suppose pas nécessairement d'éliminer cette fragilité : Xavier Dijon montre ainsi dans quelques réflexions philosophiques que la transhumanisme refuse l'humanisme qui naît de la reconnaissance personnelle.
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Créé parDiocèse de Tournai